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Textes/Encastrable


Pour l'installation "Plug and Play"

Centre d'art le 19/ Lycée Georges Cuvier


Le collectif Encastrable pratique la sculpture «par intrusion»: Antoine Lejolivet et Paul Souviron inventent les systèmes d’accès ponctuels et instantanés à des réservoirs de matériaux inépuisables. C’est à Leroy Merlin qu’ils établissent leur premier atelier de sculptures spontanées. A chacune de ses «résidences», Encastrable construit et expose simultanément: sous les yeux des clients, les artistes composent avec le répertoire de formes et d’usages que leur offrent les supermarchés. Ces performances «extraordinaires» font d’Antoine et Paul les garants d’un réseau de solutions aux manques potentiels des artistes en matériaux, lieux d'exposition et spectateurs.

Encastrable suggère une mise à disposition astucieuse et infinie des ressources de la société pour la création artistique.

Après avoir visité une première fois le Lycée Cuvier il y a quelques semaines, le Collectif propose le projet Plug and Play. Cette intervention consiste en l'installation, au milieu de la cour du lycée d’une structure/sculpture, une sorte de totem électrifié comportant un système de sonorisation puissant. Le principe consiste à permettre l'utilisation par tous de la source sonore, un ampli de guitare Fender (objet mythique, jouant d’une nostalgie intergénérationnelle), pendant un temps limité, régulier et réglementé. Chacun peut brancher un instrument de musique, un micro ou lecteur mp3. Au même titre que la sonnerie qui régule la journée de cours, une ou deux séquences sonores de quelques minutes pourront s’imposer dans l’enceinte du lycée et ainsi permettre une libre expression. L'ueuvre sculpturale, module architectural qui constitue son enveloppe en empruntant à son environnement (carapace constituée de mobilier scolaire) est aussi une matrice d’évènements. Les artistes proposent une règle du jeu et un volume qui ne devient sonore que lorsqu’une personne s’en sert. Plug&Play est en fin de compte une borne de connexion qui devient performative quand elle facilite des micro-évènements (concerts, théâtre, lectures, ...) mais aussi se transforme en plateforme d’informations interne à l’établissement . Si cette sculpture amplifiée et interactive permet à chacun de communiquer messages personnels, préférences musicales ou toutes autres propositions futiles comme réfléchies, elle est aussi localisée, visible par tous et contrainte à des horaires définies. Son statut entretient une ambigüité. L’oeuvre peut s’identifier comme un support d’expression égalitaire par son accès à chacun mais aussi comme un moyen d’expression totalitaire qui impose à tous (le son). Plug and Play incite à s’exprimer librement mais sous le joug de règles strictes.

Jean-Marie Boizeau

Avril 2011